inventeurs si vous saviez

L'affaire Feret contre l'INPI (TGI Paris 04/03/2011)

Je suis inventeur depuis 1976. J'ai déposé des brevets, en France et à l'étranger. Je sais ce que cela m'a coûté. J'ai parfois cédé des licences et récupéré un peu d'argent, mais les bénéfices nets, au bout du compte, brevets et impôts payés, n'ont jamais été extraordinaires.

Dans les années 80, j'ai rencontré, à l'occasion de mes pérégrinations professionnelles dans plusieurs pays, divers industriels, qui m'ont instruit de la notion de transfert de savoir faire. C'est ainsi que j'ai appris que bien des innovations se développement sous contrat de licence, dans le monde, sans qu'aucun brevet n'ait été déposé. Cela m'a donné à réfléchir, et j'ai voulu connaître les contours de ce que l'on appelle couramment la protection juridique de l'innovation.

J'ai étudié les textes des lois qui sont censées protéger les droits des créateurs, et, tout naturellement, j'ai été amené à constater que les droits d'auteur peuvent accorder leur protection à des concepteurs de créations de caractère industriel.

J'ai effectué nombre de vérifications, et, en 1979, j'ai cédé ma première licence non basée sur un brevet. Un industriel espagnol a monté une petite usine à Madrid, en 1982, pour exploiter mes créations. Il s'agissait de modules éclairants à base de fibre optiques. Au lieu de revendiquer par brevet la solution technique que j'avais conçue pour éclairer mes panneaux de signalisation, j'ai fait ressortir leur originalité intrinsèque: Un mode d'éclairage pointilliste jusque là inusité. Nul ne m'a contesté ma qualité d'auteur, ma paternité sur la globalité du procédé et de ses aspects industriels.

Fort de cette expérience, je l'ai extrapolée à des systèmes de contrôle d'accès électroniques, et, par la suite, à bien d'autres innovations, qui ont plus ou moins bien marché, mais je n'ai plus jamais déposé de brevet, et j'en ai tiré la conclusion que, pour un inventeur individuel, doté de peu de moyens économiques, le brevet n'était pas l'unique solution.

Pour ces raisons, quand j'entends dire "seul le brevet assure une protection légale", je sais que ce n'est que mensonge.

Poursuivant ma trajectoire, c'est en 1989 que j'ai fondé le premier groupement d'inventeurs et d'industriels désireux de valoriser les innovations en s'appuyant sur la Propriété Intellectuelle, en dehors de toute notion de brevet. Ce groupement existe toujours. Il a des ramifications à Madrid, bien sûr, au Benelux, en Israël, à Hong Kong, à Singapour, à Bucarest, notamment.

Depuis, j'ai écrit force ouvrages sur le sujet, expliquant aux innovateurs la vertu des contrats de transfert de leur savoir faire en direction du monde industriel, capables de leur assurer de bons fonctionnements, sans la moindre relation avec l'univers du brevet.

J'expose, preuves à l'appui, que le pivot d'une innovation se constitue rarement, en fait, de la simple définition de solutions techniques, mais que la création recèle bien des points qualifiables d'originaux, qu'il faut savoir définir et mettre en exergue pour invoquer des droits de propriété intellectuelle: Des droits d'auteur.

Ce cursus a fonctionné sans encombre dans la dernière décennie du XXème et au début des années 2000, époque où, ayant conclu l'essentiel de mes périples internationaux, je me suis rapproché de la France, voyant arriver l'âge de la retraite.

Le nouveau millénaire ayant vu la montée en puissance de l'Internet, je me suis organisé pour acquérir les connaissances suffisantes nécessaires à ce que, en spécialiste de l'information, que je suis depuis 1962, ce formidable vecteur de développement serve, entre autres, instrumenté par mes soins, à ma cause et celle de mes pairs: Les innovateurs.

Car, effectivement, je suis journaliste de très longue date (1962), mais également inventeur, depuis 1976, ces deux domaines n'ayant rien d'incompatible, l'un pouvant même servir à appuyer l'autre.

J'ai opté pour le partage des connaissances, un mode de pensée qui ne m'a jamais été étranger, et j'ai commencé à publier force renseignements en direction des inventeurs, les incitant à prendre conscience des possibilités réelles de protection de leurs intérêts que les lois en vigueur leur offrent.

J'ai ainsi mené une œuvre de vulgarisation, où je distille à la fois des savoirs et de la pédagogie, connaissant le public concerné, qui en a grand besoin. J'ai largement révélé l'existence de solutions de développement des innovations qui n'en passent pas par une obligation de breveter quoi que ce soit. J'ai publié les textes législatifs sur lesquels je me fonde. J'ai publié force jurisprudences qui démontrent que ces textes sont appliqués.

Et, finalement, ayant constaté que le créateur individuel recherche essentiellement dans le brevet la notification concrète, écrite, présentable de la réalité de ses travaux, bien avant qu'il ne s'agisse de protection juridique stricto sensu, j'ai voulu lui offrir de quoi se rassurer sur ce plan.

Je suis donc devenu l'adepte du Dépôt Probatoire, son porte parole volontaire.

Mes motivations sont simples: Connaissant bien les inventeurs individuels, pour en faire partie depuis des décennies, j'ai nettement pris conscience du fait qu'ils se ruent sur le brevet sans bien savoir à quoi ce titre, certes officiel, correspond, et en le confondant souvent avec une certaine notion de reconnaissance officielle, de certification, d'agrément, d'homologation, voire de normalisation.

Ils ont l'impression que, sans brevet, leur travail créatif n'existerait pas face aux tiers, faute de pouvoir présenter "ses papiers", comme sur la route, où il faut produire "les pièces du véhicule" à la police.

La notoriété du brevet est en outre telle que quasi personne ne fait l'effort de se demander si l'on ne pourrait pas s'appuyer sur un autre moyen, un autre "papier" pour représenter la chose créée de toutes parts.

C'est cette possibilité, tout à fait légitime, de décrire une invention au sein d'un document d'ordre juridique, qui existe et que je fais valoir aux yeux du public.

Je dis aux intéressés: "Puisque vous tenez absolument à détenir un papier qui représente votre création de façon crédible aux yeux des tiers, sachez qu'il existe la possibilité de l'élaborer vous-mêmes, ce papier, et de lui donner une authentique valeur de représentativité de l'existence de vos travaux originaux".

Je précise (preuves à l'appui): "Il existe une démarche nommée "Dépôt Probatoire", par laquelle vous pouvez disposer de ce fameux "papier", auquel vous tenez tant, et cette démarche est même vivement conseillée par les autorités publiques". (Le Ministère de l'Industrie).

Bien entendu, tout ce que j'expose ici est rigoureusement exact, et plus d'un l'a vérifié.

Divers inventeurs, que j'ai bien voulu éclairer de mes modestes savoirs, ont effectué des Dépôts Probatoires, et certains d'entre eux l'ont même fait à l'aide de documents conçus par mes soins, destinés à leur éviter erreurs ou omissions: Ainsi, ils sont rassurés, ils ont un "papier" à exhiber. La description de leur œuvre existe noir sur blanc.

Mais si cela calme certaines angoisses chez les individus de qui je parle, qui ne se sentent plus "sans rien", cela engendre aussi assez souvent un effet pervers, lié à l'ignorance des gens, à propos tout à la fois de l'exacte valeur de ce que représente un brevet, et de l'exacte portée d'un Dépôt Probatoire.

Muni d'un Dépôt Probatoire, l'individuel, néophyte en matière de protection juridique, et qui se réfugiait auparavant dans le giron du brevet sans en connaître les tenants et les aboutissants, aura parfois l'impression qu'il détient une autre sorte de brevet, qu'il s'agit quasiment de la même chose, à la différence près (non négligeable) que c'est nettement moins cher, et que cela lui vient d'un "organisme" différent de celui, officiel, qui délivre les brevets.

Cet effet de l'obscurantisme populaire m'a porté préjudice, en ceci que certains, candides, sont allés affirmer publiquement qu'il se passeraient désormais de brevet, protégés qu'ils se voyaient, par un certain M.Feret et, si ce n'est lui, par une organisation qu'il dirigerait.

Cette présentation des choses, totalement erronée, parvenant aux oreilles des puissances institutionnelles qui instrumentent le brevet, m'a fait passer pour un gourou, un charlatan, presque un escroc. On peut se mettre à leur place un moment. Les comprendre, au moins en partie.

J'ai beau avoir toujours adopté une attitude professorale, en expliquant sans relâche que le brevet est un titre fondé sur des revendications d'ordre technique, qu'il est délivré par l'État, qu'il s'agit d'un titre officiel, alors que le Dépôt Probatoire est une déclaration volontaire, qui n'offre que des preuves d'existence d'un travail innovant, en vue d'invoquer le droit de propriété que la loi attribue aux concepteurs d'œuvres originales, le distinguo a grand peine à s'installer dans le conscient des intéressés.

Je dispose, vous vous en doutez, d'un bêtisier personnel sur la question, que je n'ai pas l'intention de faire valoir, car ses acteurs agissent sans aucune malice, aussi ne vous illustrerai-je la situation qu'avec quelques détails semi anodins.

Par exemple, je reçois parfois des messages plus ou moins libellés ainsi:

"M. Feret, j'ai lu votre livre", ou encore, "j'ai vu votre site", ou "on m'a parlé de vous", et "je voudrais que vous m'aidiez à transformer mon brevet en copyright…"

L'esprit de ce genre de demande m'apparaît clairement: Ceux-là ont vu Merlin l'enchanteur, ils veulent y croire, tout comme si, se sentant plus ou moins déçus au sortir de chez leur médecin, ils tentaient de s'adresser à un vague rebouteux, "au cas où", parce qu'ils en ont entendu parler.

Ces braves gens m'ont fait bien des dégâts, c'est même en partie à eux que je dois la réaction violente des institutionnels, qui m'ont fait un procès, un procès en sorcellerie, certes, fondé sur des prémisses totalement fausses, mais procès quand-même.

Mais non, mes enfants, je ne suis pas le prédicateur d'un Dieu de pacotille, et les Dépôts Probatoires dont je vous parle ne sont pas ressortissants de la "planète brevet", n'ont rien à y voir.

Je vous parle d'une "autre manière de procéder", qui est légale, qui a sa valeur, mais que vous devriez vous abstenir de comparer avec les façons d'agir les plus répandues, que vous croyez connaître, que vous prenez en référence, mais dont, en fait, vous ne savez rien du tout.

Je me mets à la place des professionnels du brevet, à l'audition de vos âneries, lesquels n'ont su avoir d'autre réflexe que de me promettre au bûcher.

Je ne cesserai de vous le répéter: Le brevet vous promet une défense de vos droits, sans aucune garantie, et le contenu dudit brevet ne pourra être jugé valable ou non valable que par un tribunal. C'est là toute l'étendue de la valeur de ce titre officiel. L'INPI n'a pas le pouvoir de dire si un brevet est "bon", ou "pas bon", puisque son contenu vient de vous et pas de lui. Il a seulement le devoir de vous le délivrer contre paiement, s'il estime trouver de la nouveauté dans vos revendications.

L'INPI est un bureau d'enregistrement spécialisé. Il n'est pas là pour vous défendre, pas là pour vous aider, pas là pour vous juger. Et, bien sûr, on me l'a assez fait remarquer: Le brevet est censé protéger des solutions techniques, et rien d'autre.

De mon côté, dans l'affaire des Dépôts Probatoires, je vous pousse à rassembler ce qu'il faut de preuve pour démontrer aux tiers, et en finale, à un tribunal, que vos créations sont effectivement originales, et que vous les avez fait exister concrètement. Si vous faites la preuve de cela, vous êtes alors effectivement titulaires de droits d'auteur, et pouvez demander à un tribunal de les faire respecter.

De mon côté, je suis spécialiste de l'information (journaliste professionnel), je fais un travail de vulgarisation, c'est à dire que j'explique un sujet en détail à un public que ne le connaît pas ou très mal, et j'ai poussé le bouchon jusqu'à pondre des supports (guides et formulaires) de nature à vous éviter des erreurs grossières.

Imaginez ce qui se passerait si l'un d'entre vous exhibait à un magistrat un Dépôt Probatoire où l'on pourrait lire "Ceci est le copyright de mon brevet"…

Oh, riez si vous voulez: J'en ai connu à qui une telle absurdité ne ferait pas peur !

Mais je reviens au sujet central.

Les Droits d'Auteur sont conférés, de par la simple puissance de la loi, sans qu'aucun organisme n'ait eu à intervenir, à quiconque présente une preuve comme quoi il a conçu et réalisé une création originale.

Je suis celui qui vous parle de la manière d'organiser cette preuve, rien de plus.

Pour cela, je n'ai fondé aucun organisme, je ne fournis aucune prestation, je ne facture aucun honoraire. Je vous dispense, bénévolement, une certaine forme d'enseignement, et je vous accompagne (une certaine forme de coaching, selon la formule à la mode), jusqu'à ce que vous ayez fait enregistrer votre déclaration.

Ce qui est fait est fait. Pour ce qui me concerne, je persiste à être celui qui incite l'innovateur à la pratique du Dépôt Probatoire. J'ai l'autorisation de tribunal, qui exige seulement de moi de vous prévenir, par écrit, sur tout document dont l'objet est de constituer un Dépôt Probatoire, que les droits d'auteur ne protègent pas les définitions que l'on trouve sur un brevet, et que l'on nomme revendications. Comme ceci fait déjà partie de mes enseignements envers vous, on dira que, sur ce point précis, le tribunal a enfoncé une porte ouverte.

Et vous m'obligeriez en prenant conscience du fait que l'organisme qui valide les documents que je vous aide à élaborer ne s'appelle par "M. Feret", encore moins "le service de M.Feret", comme l'INPI l'a inventé, mais bel et bien le Service de l'Enregistrement, qui est bien officiel celui-là et fait partie du Ministère des Finances.

Et, envers ceux qui me demandent l'usage de mes méthodes et documents, je m'assure que cette formalité d'enregistrement a bien été effectuée, car c'est elle seule qui compte, dans tout cela. Je fais parfois le facteur, le coursier, pour votre compte, à ce niveau.

Mais je n'ai jamais été archiviste, ni "enregistreur public". Je ne me suis jamais fait passer pour notaire: Je ne tiens pas de "minutes".

Donc, les jeux sont faits. L'INPI, pontifiant et autoritaire, s'est inventé des griefs contre moi, suivi en cela par ses administrés les CPI, et j'ai écopé d'un jugement en première instance qui me réclame plusieurs dizaines de milliers d'euros pour avoir, paraît-il, préjudicié l'institution et la profession.

Je ferai mon affaire de ce racket. Cela ne vous concerne pas. Je suis majeur et vacciné depuis longtemps, et par ailleurs, l'aventure ne préjudiciera pas à mes héritiers: Je n'en ai pas.

Pour le reste, on m'a interdit toute publicité et démarchage sur les noms de l'une de mes méthodes et l'une de mes formulations. Je ne dois plus me présenter comme expert.

C'est tout.

Ce qui est positif, c'est que j'ai désormais "ma" jurisprudence. Elle prouve que le Dépôt Probatoire est une formalité parfaitement légitime reconnue par le tribunal. Je n'en espérais pas tant, et la publicité que mes adversaires font à ce jugement remplace bien au delà de mes espérances celle que j'aurais pu faire par moi-même.

Pour conclure, notez bien que si l'INPI a fait un tel chambard contre moi, c'est que mes travaux l'ont vraiment dérangé. Et comme mes travaux, au bout du compte, se définissent ainsi: "Sachez utiliser une bonne loi, que l'on vous occulte, et je vous y aiderai", c'est que la connaissance de la "bonne loi" en question amène les gens à voir l'INPI dans ses véritables dimensions: Un bureau d'enregistrement spécialisé, et non pas le "Défenseur des inventeurs" comme il voudrait vous le faire croire.

Là, j'ai sans doute commis un crime de lèse majesté, en vous prouvant que le brevet, quoi qu'on en dise n'est pas le seul moyen susceptible de protéger vos intérêts.

Puisse ce "crime" être profitable à vos intérêts.